Dagenais, Christian, and Émilie Robert. Le transfert des connaissances dans le domaine social. Les Presses de l’Université de Montréal, 2012.
Le 21 juin 2011 se réunissaient à Montréal plus de cinquante acteurs du milieu québécois du transfert des connaissances (TC). Regroupant trois catégories d’intervenants – chercheurs universitaires, organismes œuvrant dans le domaine du TC et établissements de services fortement engagés en TC – cet événement avait pour but d’établir les fondations d’un nouveau partenariat de recherche, rassemblement aujourd’hui appelé l’Équipe RENARD. Les participants ont ainsi fait le point sur l’état des connaissances en TC, pour ensuite discuter des principaux défis que présente ce nouveau champ d’activité. Le transfert des connaissances dans le domaine social rapporte l’essentiel des discussions et conclusions tirées de cet événement, définissant un portrait enrichissant du TC et de ses acteurs principaux au Québec il y a dix ans.
La première partie de l’ouvrage dépeint l’état des lieux de la recherche en TC, basé sur les études des chercheurs universitaires présents. Cette section couvre les connaissances et perspectives en TC propres aux domaines de la santé (chapitre 2), des interventions en santé publique (chapitre 3), des sciences sociales et humaines (chapitre 4) et propose même quelques-uns de ses enjeux épistémologiques (chapitre 5). On note que malgré la popularité grandissante du TC et la mobilisation croissante des acteurs dans tous ces domaines d’activité, très peu de données probantes existent alors sur l’utilisation et les effets des différentes stratégies de TC. On déplore également que les recherches existantes s’intéressent presqu’exclusivement à l’utilisation instrumentale des connaissances, plutôt qu’à leur utilisation conceptuelle (nouvelles interprétations) ou encore persuasive (légitimation des décisions).
La seconde partie du livre laisse la place aux organismes partenaires des milieux de pratique du TC et aux perspectives qui leurs sont propres. Le Centre de santé et de services sociaux – Institut universitaire de gériatrie de Sherbrooke (CSSS-IUGS), le centre de réadaptation en déficience intellectuelle et en troubles envahissants du développement (CRDITED) de Montréal, l’Agence de la santé et des services sociaux de la Montérégie, le Centre de liaison sur l’intervention et la prévention psychosociales (CLIPP, aujourd’hui renommé Humanov·is), le Centre de transfert pour la réussite éducative du Québec (CTREQ) et l’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ) présentent tour à tour leurs définitions, modèles et besoins spécifiques liés au TC.
Quelle est la pertinence de cet ouvrage dix ans plus tard? Si certains aspects du livre ont vieilli, par exemple l’état des connaissances en TC qui a évolué depuis, plusieurs éléments demeurent toujours pertinents. D’abord, il est intéressant de noter les différentes perspectives des chercheurs et intervenants dans les divers secteurs d’activité du TC. Le transfert des connaissances dans le domaine social demeure à cet égard une excellente introduction à plusieurs des acteurs les plus importants en TC au Québec et à leurs intérêts particuliers.
Enfin, un des aspects les plus intéressants du livre est le compte-rendu des discussions ayant eu lieu entre chercheurs et praticiens, inspirées par les cinq pistes de réflexion proposées par Lavis et al. dans leur article How Can Research Organizations More Effectively Transfer Research Knowledge to Decision Makers? publié en 2003. On y présente des enjeux clés qui demeurent toujours d’actualité, par exemple : Est-il préférable de transférer des connaissances issues d’études primaires ou de synthèses? Qui est la meilleure personne ou organisation pour véhiculer ces connaissances? Quelle est la chose à faire lorsque les milieux utilisateurs formulent un besoin pour lequel les données probantes sont rares ou mitigées? Là aussi, on présente aux éventuels néophytes une belle introduction aux défis du TC, tant au Québec qu’ailleurs.