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Par Louis Melançon, Assistant de recherche pour le Réseau Impact Recherche Canada
La montée de l’idéologie néolibérale et les réformes sur le financement des universités ces dernières années ont créé un environnement où il est de plus en plus attendu que la recherche se traduise en bénéfices concrets pour la société. Ainsi, les organismes subventionnaires fédéraux au Canada ont intégré la mobilisation des connaissances dans leurs priorités, notamment en sciences sociales et en santé. Plus que jamais, l’argent public doit avoir des retombées publiques. Alors que plusieurs études ont déjà été réalisées pour expliquer les raisons qui poussent les chercheurs à s’engager ou non dans des activités de mobilisation des connaissances, peu ou pas d’études s’intéressent spécifiquement à la perspective des étudiants aux cycles supérieurs. Quelle est leur perception face à la mobilisation des connaissances ? Comment les universités peuvent-elles mieux les soutenir dans leurs efforts de mobilisation ?
McSween-Cadieux, Chabot et collab. ont documenté la perspective des étudiants aux cycles supérieurs de l’Université de Montréal par rapport à la mobilisation des connaissances. Entre février 2019 et janvier 2020, les auteurs ont fait remplir un questionnaire en ligne à 137 répondants, pour ensuite effectuer des entretiens individuels avec 25 d’entre eux. Les étudiants ciblés étaient à la maîtrise et au doctorat, soit dans un programme de sciences sociales ou de santé publique. L’analyse des résultats était basée sur le concept de la « roue du changement de comportement » de Michie et collab. (2011) qui explique les comportements des individus par leurs niveaux de motivation, de capacité et d’opportunité.
Près de 80 % des répondants au questionnaire en ligne rapportent avoir déjà entendu parler de transfert ou mobilisation des connaissances. La moitié des répondants auraient prévu des activités de transfert hors du milieu universitaire dans leur projet de recherche, alors que le tiers n’en auraient pas prévu et que le reste des participants n’y avaient pas encore pensé. Seulement le quart des répondants rapportent avoir suivi une formation reliée à la mobilisation des connaissances dans le cadre de leurs études, alors que 70 % des répondants affirment que ces notions devraient faire partie intégrante de leur formation universitaire.
Malgré que près du trois quarts des répondants rapportent l’importance de réaliser des activités de mobilisation des connaissances aux cycles supérieurs, une majorité d’étudiants considèrent avoir une mauvaise compréhension de ce qu’est la mobilisation et quelles sont les meilleures méthodes pour la mettre en pratique. Les répondants considèrent également le milieu universitaire comme étant peu propice à la mobilisation des connaissances. Ils et elles ont l’impression que c’est une activité peu valorisée à la fois par leur programme et par les organismes subventionnaires. De toute façon, les répondants affirment manquer de temps pour mener des activités de mobilisation, avec leur horaire déjà chargé.
Finalement, les entretiens révèlent que les étudiants désirent avant tout davantage de formation pour les soutenir par rapport à leurs efforts de mobilisation des connaissances. On mentionne des formations dédiées, mais aussi l’inclusion de notions pratiques de mobilisation dans les cours existants et l’organisation d’activités de réseautage pour décloisonner le milieu de la recherche. Certains répondants ont soulevé l’importance pour les étudiants d’avoir des modèles à suivre parmi leurs professeurs, pour être inspirés dans leurs efforts de mobilisation. Mieux soutenir les étudiants dans leurs efforts de mobilisation implique donc d’agir non seulement au niveau de la communauté étudiante, mais aussi au niveau des professeurs, de la direction des universités et de leurs programmes.